Cela fait bientôt trois mois que je suis biographe hospitalière au CHU de Nantes.
Voici un partage sur mon quotidien et sur ce que j’ai la chance de vivre semaine après semaine.
Le métier de biographe hospitalier consiste à proposer aux personnes gravement malades de raconter leur histoire, et de recevoir gracieusement leur récit de vie dans un très beau livre relié par un artisan d’art.
Le biographe hospitalier travaille étroitement avec les soignants dans les unités de soins palliatifs et/ou d’oncologie. Ce sont en effet les soignants qui vont dans un premier temps proposer la démarche de la biographie aux patients.
Si la personne est d’accord pour me rencontrer, je vais la voir et nous faisons connaissance. Je lui propose des rencontres une fois par semaine à l’hôpital afin qu’elle me raconte ce qui lui tient à cœur sur sa vie. Je m’adapte à son état de santé et à sa fatigue du jour. Les entretiens peuvent durer de 10 minutes à 1 heure.
Les bienfaits de la biographie hospitalière sont nombreux. Pour le patient, c’est un projet de vie au moment où on lui parle beaucoup de la maladie et de la mort ; c’est une porte ouverte pour se souvenir de son enfance, de ses amis, de ses grands-parents, de son métier, de ses passions ; c’est dire des mots d’amour à ceux qu’on aime ; c’est témoigner et laisser une trace ; c’est s’apaiser et faire un pas de côté par rapport à la maladie. Pour les proches, c’est un cadeau ; une transmission ; un héritage immatériel ; un apaisement face à la douleur de la perte. Pour les soignants, c’est proposer à leurs patients un espace, une respiration, du temps pour se raconter. Pour la société, c’est prendre soin de chacun jusqu’au dernier souffle et dire que chaque vie est précieuse.
Depuis trois mois, je rencontre deux jours par semaine des personnes dans leur chambre d’hôpital. Je ne connais pas leur maladie, je ne sais rien d’elles et pourtant, en leur proposant cet espace de parole, ce projet, je vois rapidement s’afficher sur leur visage un sourire, un regard qui s’anime, une lumière qui les inonde. Faire le récit de son histoire, se rendre compte de tout ce que l’on a vécu, parler des rencontres, des joies et des peines fait de chacun de nous un être à part, unique, irremplaçable.
Savoir que quelque part, un livre restera et parlera de soi, quel réconfort !
Aucune journée ne ressemble à une autre et c’est ce qui me plait particulièrement dans ce métier. Je suis ouverte à l’inattendu, au possible, au pourquoi pas et à toute suggestion de la personne que je rencontre. Elle m’emmène parfois sur des chemins différents, me fait d’autres propositions de récit et c’est bien ainsi. C’est elle qui est au centre du projet, c’est elle que je suis avec curiosité, joie et confiance. C’est une rencontre avant tout.
Grâce aux récits entendus au CHU depuis trois mois, j’ai voyagé en Amérique du Sud et en Australie, j’ai écouté les musiques du groupe Cure, j’ai découvert le crochet, j’ai suivi le parcours d’un militaire engagé, j’ai partagé les joies d’une mère de famille, j’ai été émue par le récit des fêtes de mariage et de naissance des enfants, j’ai été passionnée par le métier d’infirmière. Ensemble, nous avons ri des bêtises de l’enfance, souri aux souvenirs de l’adolescence, été émus par des rencontres. Les larmes s’invitent bien sûr dans le récit, elles sont parfois lourdes et viennent de si loin. Je les accueille et n’ai pas peur du silence qui suit. Il a alors toute sa place dans le récit.
Je pourrai parler de ce métier des heures, tellement il me nourrit, me passionne et a du sens. Il est arrivé dans ma vie au moment où je pouvais lui donner le meilleur de moi-même, riche de tout ce que j’ai vécu et traversé. On ne choisit sans doute pas un tel métier par hasard, il vient dire quelque chose de nous. Pour ma part, il vient dire l’importance de prendre le temps de se raconter avant de dire au revoir à ceux qu’on aime. Prendre le temps de dire des mots d’amour. Contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, ce que je vis et propose aux personnes hospitalisées parle de vie, de la vie, de nos vies.
Je remercie chaleureusement les médecins et tous les soignants que je rencontre quotidiennement au CHU de Nantes, qui donnent de leur temps et de leur énergie pour faire connaître cette démarche de la biographie hospitalière. Sans eux, je ne peux rien.
Même si j’aimerais ne pas terminer ce mot par la question financière, je ne peux faire autrement si je veux continuer à proposer la biographie hospitalière dans les unités de soins palliatifs et d’oncologie du CHU de Nantes. En effet, l’accompagnement et le livre relié par un artisan d’art sont offerts à la personne et à sa famille. Si mon récit et mon enthousiasme vous ont convaincus de l’importance de ce projet d’accompagnement, l’association de service Une Simple Parenthèse de l’unité de soins palliatifs du CHU de Nantes se mobilise pour trouver des fonds. Pour nous aider et nous soutenir, vous pouvez tout simplement faire un don en passant par la plateforme HelloAsso en copiant et en ouvrant ce lien : https://www.helloasso.com/associations/une-simple-parenthese
Tout don sera le bienvenu et nous aidera grandement.Ce serait formidable si vous pouviez partager ce message sur les réseaux et à vos proches. Nous répondons également aux appels à projets et sollicitons les grandes entreprises. N’hésitez pas à en parler autour de vous, notamment si vous connaissez des chefs d’entreprises ou des mécènes qui seraient sensibles à ce projet.
Les dons versés à l’association Une Simple Parenthèse ouvrent droit à la défiscalisation : 66 % pour les particuliers
Un très grand merci à chacun !
Je termine par ce mot recueilli par un patient : » Je suis très malade mais j’existe encore ! La preuve, je fais un livre sur ma vie ! »
Elisabeth de Gentil-Baichis
Biographe hospitalière au CHU de Nantes
Tel : 06 87 29 79 82
elisabethdegentil@gmail.com